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Eglise indépendante: l’Ukraine attend la décision historique de son concile

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Eglise indépendante: l’Ukraine attend la décision historique de son concile

Des milliers de personnes se sont rassemblées samedi à Kiev, pour soutenir la création d’une Eglise indépendante de Moscou, devant une cathédrale où un concile orthodoxe doit acter cette décision historique censée davantage éloigner l’Ukraine de la Russie.

“Restons ici et prions pour que l’Eglise ukrainienne soit créée aujourd’hui”, a déclaré le président Petro Porochenko, en serrant les mains à des manifestants alors qu’il se dirigeait vers la cathédrale Sainte-Sophie datant du XIe siècle pour assister à l’ouverture du concile.

Ce “concile de réunification”, qui se réunit à huis clos, doit procéder à la création d’une Eglise ukrainienne indépendante et élire son primat.

Il rassemble essentiellement deux formations orthodoxes dissidentes, le Patriarcat de Kiev, autoproclamé en 1992 et qui compte le plus grand nombre de fidèles, selon les sondages, ainsi que la minuscule Église dite autocéphale.

La branche loyale au Patriarcat de Moscou, qui a perdu une partie de ses fidèles mais possède toujours le plus grand nombre de paroisses, a rejeté le concile “illégal” et interdit à son clergé d’y participer.

Plusieurs de ses évêques et prêtres se sont pourtant joints au rassemblement, a affirmé dans un communiqué le Patriarcat de Kiev. “J’ai vu deux de nos évêques sur des photos” du concile, a confirmé à l’AFP l’archevêque Kliment, porte-parole de la branche loyale à Moscou.

Ce rassemblement doit permettre de mettre en oeuvre la décision historique du Patriarcat de Constantinople, figure d’autorité dans le monde orthodoxe, qui a donné l’autorisation en octobre à l’Ukraine de disposer de sa propre Église, après 332 années de tutelle spirituelle de son puissant voisin.

Cette décision a suscité l’ire de l’Église russe, qui a dénoncé un “schisme” et rompu ses liens avec Constantinople.

Pour les autorités prooccidentales ukrainiennes l’indépendance de l’Eglise orthodoxe, largement majoritaire dans ce pays, est une “question de sécurité nationale”, dans le contexte d’une crise sans précédent entre Kiev et Moscou.

Les relations entre ces deux ex-républiques soviétiques sont au plus bas depuis l’arrivée au pouvoir d’autorités prooccidentales en Ukraine en février 2014.

Un mois plus tard, la Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée. En avril de la même année, une guerre entre séparatistes prorusses et forces gouvernementales a éclaté dans l’est de l’Ukraine faisant depuis plus de 10.000 morts.

– Crainte de provocations –

Fin novembre, la situation s’est encore dégradée d’un cran lorsque la Russie a intercepté manu militari trois navires de guerre ukrainiens au large de la Crimée, première confrontation militaire ouverte entre ces deux voisins.

Cette semaine, les services de sécurité ukrainiens (SBU) ont dit craindre des “provocations” de la Russie durant le concile.

Dans ce contexte, les autorités ont déployé plus de 4.000 policiers et membres de la Garde nationale à Kiev, notamment autour de la place Sainte-Sophie où se tenait le rassemblement en soutien de concile.

“C’est un événement très important pour moi, notre peuple l’attendait depuis longtemps”, a pour sa part déclaré à l’AFP un des manifestants, Mykhaïlo Khalepyk venu dans la capitale depuis la région de Kherson (sud).

“Notre Eglise doit être enfin indépendante de Moscou”, a poursuivi cet homme de 65 ans. Comme beaucoup d’autres participant au rassemblement, il avait un ruban jaune et bleu, couleurs du drapeau ukrainien, autour du bras.

Plusieurs manifestants ont indiqué à l’AFP avoir été transportés à Kiev depuis la province gratuitement en bus pour cette manifestation après avoir répondu à une annonce d’invitation postée dans leur église.

L’Eglise dépendante de Moscou accuse Kiev de faire pression sur son clergé pour le forcer à se rallier à la nouvelle formation, alors que la police a récemment perquisitionné plusieurs églises du Patriarcat de Moscou.

Le patriarche orthodoxe russe Kirill a dénoncé les “persécutions” contre le clergé et les Ukrainiens restés sous la tutelle de Moscou, dans une lettre adressée au pape et à l’ONU, mais aussi au président français Emmanuel Macron et à la chancelière allemande Angela Merkel.Les autorités ukrainiennes se sont voulues rassurantes, assurant que chaque paroisse sera libre de choisir de rejoindre ou non la nouvelle Eglise indépendante et disant vouloir à tout prix éviter une “guerre religieuse” dans le pays.